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Les mots sacrés

Vers un masculin resacralisé

Cet été, j’ai vécu une expérience assez incroyable : je me suis sentie comme un homme. Avec une énergie brute et ascendante qui avait besoin de s’exprimer par du sport à haut volume, une libido obsédante à crever le plafond, une focalisation sur l’argent et le besoin d’en créer, un détachement des situations et des émotions, une projection vers le futur et les projets… un homme quoi (si je grossis le trait pour les besoins de la démonstration of course). En tout cas, l’énergie masculine qui m’envahit et relègue le féminin au placard.

Et ben, c’est pas facile.

Ce n’est pas facile d’être dépositaire de cette force et de ne pouvoir complètement la libérer, la transformer. C’est comme une cocotte-minute sur le point d’exploser avec la possibilité de tomber dans la violence à tout moment. Pour que ça sorte, pour que ça s’exprime, pour créer des formes dans le monde. C’est tout le temps là, dans le corps, dans les pensées, au creux du ventre. Au contact de ces sensations, j’ai compris combien le besoin de maitrise (et non de contrôle) est essentiel à l’équilibre du masculin. Alors que c’est le besoin de lâcher-prise (et non de passivité) qui est primordial au féminin. Pas les mêmes besoins, pas les mêmes moyens. Là est la complémentarité et l’union divine.

Je ne parle pas uniquement du masculin pour parler des hommes (bien qu’ils soient principalement concernés) mais pour évoquer le masculin en chaque être : équilibre entre maitrise et lâcher prise en fonction de la polarité investie. Plus on connait ce que représente chaque polarité, plus on peut lui offrir ce dont elle a besoin (et ça fonctionne pareil dans une relation).

D’ailleurs c’est quoi l’énergie du masculin ?

C’est une des 2 polarités de l’énergie qui organise toutes choses en ce monde, de l’atome aux planètes. L’énergie électro-magnétique. L’électrique est la polarité masculine. Le magnétique, la féminine. Nous allons nous concentrer sur la masculine.

Le yang, le masculin, l’électrique


Le courant électrique est droit, émissif et directif. Il part de quelque part pour aller ailleurs, en ligne droite. C’est une énergie d’ascension, d’action, de droiture. L’énergie du masculin est celle qui nous fait nous lever de notre canapé pour faire des trucs. Elle porte notre volonté, notre détermination, notre ambition. En sa présence, nous sommes droits, courageux, valeureux. Elle abrite également l’espace de la raison et de la rationalité, par le mental affuté nous pouvons faire preuve de discernement, choisir et trancher en conscience. Nous cadrons, ordonnons, sécurisons et protégeons ce qui a de la valeur pour nous. Nous pouvons faire preuve de force et n’avons pas peur d’aller au combat si nécessaire, pour établir la stabilité, la pérennité et l’ancrage. Le masculin est la manifestation de la Vie. En tout cas, le masculin sacré ou divin, c’est-à-dire l’énergie dans sa vibration haute, lumineuse, équilibrée. Là où la maitrise permet l’élévation de la fréquence et donc de l’être.

Car comme tout à sa polarité dans ce monde, l’énergie du masculin peut aussi vibrer dans des fréquences basses, sombres et déséquilibrées. C’est le masculin blessé ou toxique. Et c’est celui-là qui nous fait beaucoup de mal collectivement depuis plus de 2000 ans. Le masculin blessé enclenche l’hyperactivité, l’hyper-rationalisme, la rigidité. Le mental dirige tout et refuse ce qui ne peut être prouver. L’action est préférée au repos et s’arrêter n’est plus une option. Là où il y avait de la force, il y a de l’agressivité et de la violence. La protection et la sécurité se transforment en paternalisme et autorité, l’ancrage devient l’immobilisme et le traditionalisme. Le masculin dans sa quête de manifester en veut toujours plus : d’argent, de reconnaissance, de travail, de sexe, de plaisir… Il n’est plus motivé par l’élévation mais par la possession et le pouvoir.

Avec cette synthèse du masculin blessé, on a une bonne description des maux de notre société actuelle. Ce n’est pas le masculin le problème, c’est son déséquilibre.

Resacraliser le masculin c’est déjà l’aimer et l’amener vers de plus hautes sphères, bénéfiques au niveau individuel comme collectif.

Comment faire ça ? On peut se sentir démuni•e face à l’ampleur de la tâche. je le comprends. Mais chaque changement important commence toujours par soi. C’est pourquoi il est nécessaire de regarder où on en est avec son masculin : est-ce-qu’on le déteste ? le rejette ? ne veut plus en entendre parler ? Est-ce-qu’il est omniprésent ? douloureux ? tyrannique ? Dès qu’il y a du rejet, il y a de la séparation. S’il y a de la séparation, il n’y a pas d’acceptation. S’il n’y a pas d’acceptation, il n’y a pas d’amour. Rejeter son masculin, c’est se rejeter soi-même et ne pas s’accueillir complètement dans l’amour.

Mais parfois pour pouvoir accepter, on a besoin de comprendre. Comprendre cette énergie, comprendre pourquoi on a cette relation avec elle. Les archétypes du masculin nous donne une grille de lecture plus fine et permet de connecter plus facilement à des figures qui sont des parts de nous-même. Il existe plusieurs typologies d’archétypes du masculin, j’aime particulièrement celle des 4 archétypes : l’Amant, le Guerrier, le Roi et le Mage.

Un archétype est un modèle emblématique issu de l’inconscient collectif, qui incarne un concept, une idée, une énergie.

L’Amant 

L’Amant est la part du masculin qui complètement incarnée dans ses 5 sens et recherche le plaisir terrestre sous toutes ses formes. Il sait aussi qu’il fait partie d’un grand Tout et sait s’émerveiller et s’émouvoir de la beauté du Vivant. L’Amour est son moteur. Il est créatif et énergique et cherche la connexion pleine et entière, le jeu et la sensualité. Sa sensibilité et son empathie peut le mener à de grandes souffrances comme de grandes joies.

Dans son ombre, l’Amant ne cherche que le plaisir et surtout son plaisir. Son coeur devient froid et ne se satisfait que de superficialité. Il consomme la Vie et joue de ses charmes pour obtenir ce qu’il veut.

Le Guerrier 

Le Guerrier agit avec détermination et force. Il est à l’initiative et n’a pas peur de défendre son royaume. Toujours alerte et attentif, il se tient prêt physiquement et émotionnellement à agir pour un monde plus juste, pour les causes qui lui tiennent à coeur. C’est un flux d’énergie très intense qui pousse toujours à continuer. Le Guerrier est aussi stratège et fait preuve de discernement et de clairvoyance. Connecté à sa vulnérabilité et l’Autre, il est le protecteur et la force motrice.

Dans son ombre, le Guerrier devient un mercenaire. Sans but, sans valeurs, il utilise sa violence pour son bon plaisir et pour assoir son autorité sur les autres. Il conquiert les choses et les gens soit avec froideur, soit avec sadisme.

Le Roi 

Gardien de l’intégrité, le Roi est celui qui ordonne et qui bénit par les mots et sa présence dans son royaume. Chargé de ses fonctions par le divin, il transmet et fait respecter les lois universelles. Il est le centre, l’exemple et voit chacun•e à sa juste valeur et avec bienveillance. Il stabilise les émotions et apporte le calme, l’équilibre, la force de vie et la joie. C’est par lui que viennent la sécurité et la paix.

Dans son ombre, le Roi devient un tyran. Autoritaire, paternaliste, assoiffé de pouvoir et de richesse, il a peur de perdre son trône et dévalorise, agresse les autres (même les siens) pour rester à sa place.

Le Mage 

La Mage est détenteur des secrets de l’Homme, de la nature et du cosmos. Il maitrise à la fois la théorie et son application. Sa quête est de chercher et de connaître. Il peut ensuite conseiller, guider et initier l’Autre en conscience et pour le plus grand Bien. Il sait discerner les faux-semblants et dégonfler les egos. Il utilise des outils pragmatiques adaptés à son besoin, développe un savoir-faire et une technique particulière et aime les nouvelles technologies. 

Dans son ombre, c’est un magicien noir en quête de pouvoir. Il influe le destin des êtres par son grand savoir et son magnétisme. Il agit dans l’ombre et tire les ficelles pour la réalisation de son désir personnel et de ses intérêts.

Ces 4 archétypes vivent en chaque être, avec une place et une qualité différentes.

L’énergie du masculin étant linaire, il cherche à passer de l’immaturité à la maturité. C’est là que les archétypes peuvent entrer dans la lumière : par l’ordre, la discipline, la sagesse qu’offre l’expérience et l’âge. Le masculin s’éprouve. C’est aussi le féminin qui lui offre un but, un coeur, une mission divine à remplir. De l’intérieur vers l’extérieur. L’un au service de l’autre pour le plus grand bien.

Cette expérience du masculin en moi a duré quelques semaines, puis la roue a tourné, a trouvé un autre équilibre. Mais je n’oublierai jamais ces sensations. Elles m’ont apporté encore plus d’amour et de bienveillance pour les énergies masculines : j’ai ressenti, je comprends mieux. J’ai senti ce masculin en moi tellement capable et fort (Mars en Scorpion bonjour) et je n’ai pas envie de le diminuer, de le dévaloriser. Il est fucking sacré, comme mon féminin. Je laisse danser chacun de mes archétypes sans en repousser aucun, tout en veillant à ne pas tomber dans les polarités blessées qui m’emportent loin du centre.

Oui le masculin sacré est beau et nous en avons collectivement besoin.

C’est lui qui nous apporte des sociétés qui se tiennent debout, portent et défendent leurs valeurs, se pérennisent et regardent vers demain avec foi et inventivité. Chaque être qui allume la lumière du masculin divin en lui éclaire toute sa communauté. Nous pouvons devenir ce feu ardent de la conscience réunifiée. Les uns après les autres, les uns avec les autres.