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Les mots sacrés

La Vie n’est pas une salle d’attente.

Cet article, je l’écris pour moi aussi. Pour ne pas oublier.

Pré-voir. Pré-dire. Pré-parer. Pré-occuper. Le sentiment d’être un être ballotté par les évènements, sans pouvoir, sans contrôle, nous pousse dans une quête du « pré-« . Une tentative désespérée de nous sentir en maitrise de nos destins : si j’anticipe tout et travaille avec acharnement, mes rêves deviendront réalités, non ? Peut-être mais que se passe t’il pendant ce processus, on attend que nos désirs se réalisent, que notre Vie soit belle ? Je refuse de faire de ma vie une salle d’attente.

Lorsqu’on souhaite se réaliser, on peut être en attente de recettes, de méthodes, de moyens pour y parvenir. Que ce soit pour un projet pro ou perso, un projet bébé ou achat immo. Dans l’attente de l’aboutissement de nos rêves, on se fait parfois vivre un enfer personnel : « Est-ce-que j’ai fait assez ? Ai-je posé les bonnes intentions ? Suis-je dans la bonne énergie ? Suis-je bien à ma place ? Suis-je assez bien ? » (liste non exhaustive). La peur de l’échec, du manque ou du rejet me plonge dans une expérience intérieure entièrement focalisée sur la réussite, tellement que j’en oublie parfois simplement de vivre. On attend et on peste que ce qui n’arrive pas, n’arrive pas. Le doute et la culpabilité s’installent.

Alors on veut maitriser le « comment » et le « quand » je vais y arriver.

Poser une intention me permet de rentrer en dialogue avec le divin. D’être créatrice de ma vie et non simplement une marionnette. Me mettre en action pour que mon intention advienne aligne mes pensées et mes émotions pour qu’elle se matérialise. Oui c’est nécessaire, mais je n’ai plus envie que ma vie soit une tempête de doutes, de « et si » et de « j’ai mal fait » jusqu’à ce que mon intention se réalise. Je n’en peux plus de ces moments-là. Cela fait retomber l’énergie créatrice pour laisser mes bas désirs prendre le dessus : plus de client•es, plus d’argent, plus d’amour… ou alors mes peurs de pas être assez (bien / compétente / spirituelle / humaine… la liste est longue). Si j’ai la foi, elle est là en toutes circonstances et non pas que lorsque mon caprice est réalisé. Pendant la traversée, je peux alors profiter plutôt que me flageller non ?

L’équation est aussi simple que complexe : Se mettre en action ET se laisser porter. Mais bon sang, comment lâcher prise sans abandonner ? Comment nourrir une idée sans s’y accrocher ? Comment intentionner sans avoir d’attente ? Comment faire de son mieux et accepter que parfois cela ne suffise pas ? Comment être créateur•rice de notre vie tout en acceptant que la vie nous dépasse ? Comment savoir ce qui est juste lorsque nous sommes piloté•es inconsciemment par nos peurs individuelles et collectives ?

Je trouve souvent le calme face à ces questions dans le silence et le repli. Ne plus laisser l’extérieur venir m’interférer. Arrêter de faire, de penser. Me souvenir que je ne sais rien et qu’à la fois je peux tout.

C’est vertigineux car cela me fait entrer dans l’espace du « ET » au lieu de l’espace du « OU ».

Je peux être en train de changer mon futur ET me connecter à mon présent. Je peux être heureuse seule ET me sentir seule. Je peux avoir envie d’étrangler ma fille (métaphoriquement parlant) ET l’aimer à la folie. Je peux adorer voyager ET me sentir bien chez moi. Je peux faire ET être. Dès le plus jeune âge, on nous demande de choisir, de nous définir par une seule voie. Et lorsque deux voies nous attirent, on a l’impression de se fourvoyer, de ne pas être comme tout le monde, de ne pas parvenir à choisir. J’apprends de plus en plus à épouser le « ET » dans toutes ses formes et avec sérénité. Action ET passivité. Intuition ET raison. Terre ET ciel. Bas ET haut. Féminin ET masculin.

Matt Simons & Karen Lychn

Les voies du seigneur sont impénétrables. Je ne sais pas ce que la Vie a dans ses sacoches pour moi, et c’est bien là une de ses merveilles : de ne pas savoir absolument tout ce qui va m’arriver ! Quelle tristesse sinon ! Alors oui parfois ce sont des coups durs mais cela permet aussi de me réaligner, de grandir, d’être toujours plus proche de l’Amour inconditionnel, car non lié aux circonstances. Accepter ce qui vient de façon équanime. Sans jugement de valeur.

Je fais de mon mieux pour arrêter de pré-voir, de pré-dire, de me pré-occuper et de pré-parer. Je préfère voir, dire, occuper voire parer si c’est nécessaire.

Parce que la Vie est à cet endroit-là et à cet endroit je peux alors KIFFER. Arrêter de me préoccuper, c’est passer du temps à faire ce que j’aime sans nourrir le monstre « peur » que quelque chose de moche va m’arriver si je ne fais pas tout à chaque instant pour sauver ma peau. Dessiner, cuisiner, rêvasser, écrire, aller au cinéma, siester… me donne le plaisir d’accueillir avec joie la réalisation de mon intention. Cela aide même à nourrir la gratitude pour le cadeau de la Vie.

Plus que d’abondance matérielle, je veux que ma vie soit une abondance de vie. Pas une salle d’attente pour intentions non-réalisées ou « pas-encore » arrivées. Dans cette impulsion, ce mois-ci j’ai reçu un soin en forêt, traversé de merveilleux paysages d’Ardèche, mangé du pesto de plantain maison, improvisé une soirée cacao autour du feu en belle compagnie, pratiqué l’accrobranche (pas ma zone de confort clairement) et la tyrolienne géante avec vue sur le Mont Blanc, fait découvrir mes artistes préférés à un ami qui est devenu fan, pris dans mes bras des personnes formidables que je ne connaissais que virtuellement, dansé dans une salle des fêtes sur du Johnny, pris l’apéritif sous la pluie avec mes proches amies, retrouvé mes yeux d’enfant face aux acrobates du cirque… J’ai ouvert mon coeur, exploré, créé des instants, des anecdotes, des sensations. Est-ce que cela fait inscrire des personnes à mon prochain atelier ? J’en sais rien. Est-ce-que je vais rencontrer quelqu’un comme ça ? J’en sais rien non plus. Je ne maitrise pas ce que le battement d’aile d’un papillon peut provoquer comme tsunami dans ma vie.

La plus petite des décisions peut engendrer les plus grandes opportunités.

Mais je refuse de me faire vivre l’angoisse en attendant que ce qui doit arriver arrive. J’ai confiance. Ma foi est indéboulonnable. Parfois l’extérieur peut la faire vaciller, mais j’y reviens toujours. Je sais que je suis soutenue comme nous sommes tous•tes soutenu•es.

Il y a quelques jours, je me suis garée un peu trop près d’un fossé en rase campagne. Je rejoignais une amie et nos efforts pour pousser la voiture n’ont rien donné. Le déroulé façon « film catastrophe » s’est enclenché : « Je ne connais personne dans ce coin, personne ne va venir m’aider ici, je vais devoir appeler l’assurance, est-ce-que je suis couverte pour ce type de problématiques, j’ai pas les moyens de payer une grosse franchise en ce moment… » Mais j’ai vite repris le chemin de la confiance : « Je ne sais pas comment mais cette situation va se résoudre avec facilité. » Mon amie qui connait le coin tente d’appeler un centre équestre non loin en présupposant qu’ils auraient sûrement un tracteur pour tirer la voiture. Mauvais numéro elle contacte une ferme à l’autre bout du village… au téléphone, l’agriculteur ne voit pas trop où on est mais décide de nous retrouver. Pas plus de 15 minutes plus tard arrivent deux véhicules, deux frères qui ont pris du temps sur leur journée de travail pour venir me dépanner. Une voiture légère pour éclairer la voie et nous trouver sur les petits chemin et un tracteur pour le dépannage. Ils savent comment trouver le crochet de traction sur mon véhicule, le manoeuvrent et le garent correctement, tout ceci avec un grand sourire. Comment aurais-je pu pré-voir cette issue ? Je ne pouvais pas et j’ai été renversée par la générosité et la gentillesse de ces personnes. Ma mésaventure m’a enseignée et guérie le coeur. On peut trouver de l’aide partout, il suffit parfois de demander et d’y croire vraiment. Je n’ai pas à trouver sans cesse toutes les solutions, la Vie gère cela à ma place.

J’écris cet article pour moi aussi. Pour quand je doute, quand je me sens pas assez. Je suis assez. Ce n’est pas mon job de me préoccuper du comment. Mon job est de sortir de mes peurs et de ma zone de confort, de m’offrir les opportunités de faire ce qui me fait vibrer, du plus insignifiant au plus grand, de nourrir ma confiance en l’avenir, même si le chemin ou le résultat ne plaise pas à mon mental. Alors je continue d’augmenter ma dose de joie, fun, plaisir, surprises, expériences, audace, sieste impromptue et glande assumée dans mon quotidien. Depuis cet espace, j’ai hâte de vivre chaque jour de ma vie, quoique j’accomplisse ou non. Je quitte la salle d’attente de ma vie pour la vivre pleinement.